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Questions-Réponses autour du FIFDH 2011

lundi 21 mars 2011, par Abla Kandalaft

La plupart des films de l’édition 2011 du FIFDH ont été suivis d’une séance débat qui ont permis d’éclairer le processus de réalisation et les sujets traités.
Many of this year’s films at the International human rights film festival were followed by Q and As that shed light on their making and on the topics tackled.

L’Enfer au Paradis de Frank Garbely. Distribution : www.ictv-solferino.com

Ce film retrace la destruction de la province du Choco en Colombie, la violence et la brutalité infligées à une population au nom de la culture du palmier africain, destinée aux agro-carburants, via l’intervention de paramilitaires.

Projection suivie d’un débat avec le réalisateur Frank Garbely et Hilda Carrera, Responsable plaidoyer Secours Catholique-Caritas France

Q L’ONU doit bien savoir ce qui se passe. Pourquoi n’agit-elle pas ?

F. G. Pour l’ONU, il n’y bientôt plus de pétrole. Tout le monde connait les conséquences de ces activités mais veut assurer une source d’énergie à n’importe quel prix.
H. C. Il faut rajouter que l’on peut voir l’émergence d’une plateforme de contestation et de campagnes d’informations. On peut faire pression. Cette force d’unification peut donner des résultats.

Q Pouvez-vous montrer ce film en Colombie ?

F. G. Il faut penser que pour la plupart des gens à Bogota cette situation n’existe pas. Ceux qui soutiennent les paysans courent un danger et craignent les représailles des paramilitaires. Il y a beaucoup de crimes impunis. N’oublions pas que c’est le pays avec le plus grand nombre de syndicalistes tués.
H. C. Je reviens là-dessus. L’Union Européenne a accepté de signer un accord de libre association alors que le même le gouvernement américain a refusé cet accord en citant pour cause l’assassinat des leaders syndicaux

Q Quel est rôle de l’Eglise dans l’histoire ?

H. C. Comme dans le reste de la société, au sein même de l’Eglise une grande partie du clergé ignore ou choisit d’ignorer ce qui se passe et une partie se bat aux côtés des habitants du Choco. Ce sont des membres du clergé, souvent ceux au bas de la hiérarchie qui font un choix individuel d’intervenir.

Q Qui sont les paramilitaires et la guerilla ?

F. G. Les paramilitaires ont été longuement employés par les entreprises et les propriétaires terriens pour renvoyer ou assassiner les paysans qui habitaient déjà sur ces terres. Ils sont souvent mal payés et vivent dans des conditions très difficiles et sont récompensés suite aux agressions. La guerilla est composée de groupes très divers mais à l’origine son but était de défendre les paysans.

Dem dikk (aller -retour) de Karine Birge. Production : Centre Vidéo de Bruxelles.

Dem dikk nous présente une série d’entretiens avec des habitants de Dakar, jeunes pour la plupart qui débattent et discutent de l’immigration en France de leurs proches. La réalisatrice nous relaie des propos intelligents, révélateurs et revendicateurs que l’on entend peu.

Projection suivie d’un débat avec Marianne Le Gall Diongue, chargée de projets Afrique de l’Ouest Secours Catholique Caritas France.

Q Où sont les femmes dans cette histoire ?

M Historiquement, l’immigration a essentiellement été masculine mais elle se féminise peu à peu.

Q Qu’est ce qui pousse ces jeunes à partir ?

M Il y a une tradition migratoire au Sénégal depuis les annéess 50. La politique d’économie libérale du gouvernement s’est mise en place aux dépens des politiques d’emplois et de l’agriculture. La filière arachide faisait vivre le pays. Maintenant les récoltes pourrissent et les agriculteurs se retrouvent sans travail. Un autre potentiel qui a souffert est celui de la pêche. Les ressources halieutiques se raréfient, le secteur est en crise et les pêcheurs se convertissent en transporteurs de migrants. Le seul secteur qui marche est celui de la construction mais il ne fait vivre qu’une partie de la population.
L’éducation est un autre secteur sinistré. Nous avons rencontré des étudiants sénégalais en colère contre le gouvernement qui inviestit dans des secteurs inutiles. Il y a des élections en 2012. Il y aura sans doute une colère exprimée par rapport au gouvernement actuel.

Q On n’entend parler que de leurs amis qui s’en sortent en partant à l’étranger. Y en a-t-il qui échouent ?

M Le débat est intéressant. L’Europe reste l’Eldorado. Le discours du migrant qui s’en sort, qui doit montrer qu’il a réussi est très présent dans les mentalités. Par contre, le mythe s’effrite peu à peu, il y a beaucoup de situations difficiles et les politiques de visa sont très restrictives.

Q Comment se passe ces migrations au niveau du continent africain ? Les pays avoisinants contrôlent-ils les frontières ?

M L’UE demande à ce qui’il y ait des contrôles. La Lybie et le Maroc font barrage. Ils sont financés pour cela, d’où la mise en place des camps de détention financés par l’Italie. La Mauritanie refoue actuellement beaucoup de Sénégalais et de Maliens. Il existe un morcellement fort dommageable dans une espace conçu à la base comme l’UE pour permettre la libre circulation.

Q Dans quel état est le système éducatif ?

Il est relativement en avance par rapport aux autres pays dans la région. Mais il y a de fortes inégalités et le secteur reçoit de mois en moins d’investissements. J’ai constaté que les universités manquent de moyens, il y a peu d’ordinateurs, les bourses sont insuffisantes, les classes sont surchargées. Le plus inquiétant est qu’il n’y a plus de formation de haut niveau et d’ingénieurs qui pourraient intervenir dans les secteurs en crise.

A toxic playground / Terrain de jeu toxique de Lars Edman et William Johansson. Prod : Laika Film, www.laikafilm.se

Film bouleversant réalisé par un jeune suédois, Lars, étudiant de cinéma au Chili qui découvre que les enfants d’Arica sont tombés malades à cause de déchets toxiques envoyés là depuis sa ville natale de Boliden en Suède.

La séance était suivie d’un débat avec William Bourdon et Sandra Cossart, respectivement directeur et responsable du programme Globalisation et Droits Humains de l’association de défense des droits de l’homme des crimes économiques Sherpa.

Q Existe-t-il des conventions internationales qui régissent les actions des multinationales ?

S. C. Il existe des conventions qui imposent aux entreprises des règles concernant le rejet de produits toxiques mais il n’y a pas de normes universelles. Les conventions sont signées par les Etats.

Q Les déchets sont-ils traitables afin de devenir inoffensifs ?

S. C. Même les scientifiques sont incertains de cela car même après traitement, les déchets ont une durabilité intraçable. Je sais que des instruments de « traçage » ont été développé notamment pour suivre les effets de l’agent orange au Viêtnam.

Q Quelle est l’approche de Sherpa pour imposer des règles aux entreprises ?

S. C. Je pense qu’il faut passer par un dialogue mais pas un dialogue naïf et s’adapter aux situations individuelles. Je pense qu’il faut passer par des procédés quand c’est possible et quand ce n’est pas le cas il faut passer par la négociation et des procédés extrajudiciaires qui permettent de faire valoir le droit des victimes.

Q Pensez-vous que les mentalités aient évolué au sein de ces entreprises ?

W. B. L’état d’esprit des chefs d’entreprise dans les années 80 est quand même très différent d’aujourd’hui. De nos jours on se soucie beaucoup plus de l’image éthique de l’entreprise. C’est souvent instrumentalisé, cynique, parfois sincère. Ils ont intériorisé l’idée que le respect des droits de l’homme fait gagner en crédibilité. Malheureusement, la financiarisation du marché fait obstacle car la logique du court terme antagonise la logique du long terme de l’intérêt général.

Q La condamnation de Texaco à payer des dédommagements en Equateur peut-elle faire jurisprudence ?

W. B. J’ai consacré un chapitre de mon livre à cela. Le procès a été lancé à New York. Les avocats de Texaco avaient insisté pour passer devant la justice en Equateur ; ils s’imaginaient que les juges seraient plus cupides ou corrompus plus facilement. Malgré tout, ils ont perdu le procès. A la longue, oui, je pense que ce cas peut servir de jurisprudence.

Q Que peut-on faire au niveau individuel ?

S. C. Vous pouvez exiger certaines choses à vos dirigeants, dans le cadre de pétitions. Par exemple, que les entreprises prennent leurs responsabilités par rapport aux filiales et que les victimes hors UE aient accès à la justice européenne.

A blooming business / Un business florissant de Ton Van Zantvoort.
Production Newton Film, www.newtonfilm.nl.

Un film poétique, selon son réalisateur, qui dévoile les conditions misérables de travail dans les fermes à fleurs au Kenya, où des travailleurs précaires et souvent malmenés cultivent ces mêmes roses que l’on achète ici en Europe.

A poetic film, in the words of its director, that uncovers the miserable working conditions in Kenyan flower farms, where precarious and mistreated workers grow the very same roses that we buy here in Europe.

The film was followed by a Q and A with director Ton.

Q How did you go about making the film ?

T I was in Kenya working with children with disabilities at the time when I came across these flower farms. Some of these children were left alone so we went to see where their mothers were and we found them working on these farms. I come from the Netherlands and had no idea our flowers were shipped in from there. I decided to make a documentary about this. I didn’t receive any financial help ; it took me four years to finish and I did everything from filming to editing.

Q How did you find and select the people who featured in the film ?

We had some contacts there, mainly human rights organisations and a union leader who knew just about everyone. We had to talk outside the farms in isolated places. The only farm that allowed some filming was a Dutch farm with slightly better policies. I spoke to 35 people across many farms but couldn’t include them all in the film. I focused on Jane because I was particularly touched by her situation and the way she handled it. She represents many working women in Kenya who are left by their husbands and raise children by themselves.

Q What became of Jane ?

T She lost her job we suspect as a result of talking to us, someone must have told the manager. Or she could have refused to sleep with him. Our contact there advised us against signing a contract with Jane to guarantee her job in case she leaves altogether. When we heard the news we tried to support her through a human rights organisation but when we spoke to her she told us she never received any money. So in the end I sent her money directly and now she’s setting up her own business.

Q Do you feel like the film can help to gain justice ?

T The film has been screened in 70 screens and won a number of awards so I am hoping many people see it. Sadly, I didn’t see a clear solution. The film goes to show how everything is related in a globalised world, it is very difficult to pinpoint bad guys and good guys. We need to look at the underlying conditions.

Q How much did it cost to make such a documentary ?

It cost much more time than money. It took a very long time to find the right times to film, the editing, sending it to festivals, printing the leaflets and posters. In terms of money, there were only two of us doing everything, so although a film like this can cost up to 200 000 dollars, it cost us a fraction of the price.

If you wish to contact producers or directors or order a dvd copy of the film, drop us a line here.

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